Le développement des capacités physiques induit inexorablement la notion de force. Il va donc de soi que beaucoup de méthodes orientées force et puissance font partie prenante de la préparation physique. Ces dernières années, l’une d’entre elles, la méthode bulgare, a spécialement attiré l’attention des préparateurs physiques, sportifs, mais aussi des communautés scientifiques et médicales.
Encore connue sous « complex training », cette technique, faisant partie des méthodes dites par contrastes, a en effet fait l’objet d’études qui ont successivement révélé des bienfaits quant au travail de la force et de la vitesse.
La méthode bulgare en musculation
Les fibres blanches sollicitées
Avec la méthode bulgare, il est question de surprendre l’organisme et plus spécifiquement de travailler les fibres blanches, encore appelées « fibres rapides » ou « de type 2 ».
Par opposition aux fibres musculaires lentes intervenant dans les efforts d’endurance, celles-ci, plus volumineuses, sont présentes dans les exercices physiques de forte intensité, ou nécessitant une exécution rapide des enchainements (sprint, saut, charges rapides, par exemple).
Les fibres de type 2 s’adaptent aux efforts anaérobies et se développent plus vite que les fibres lentes, sollicitées lors des épreuves d’endurance. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les fibres rapides sont celles sur lesquelles les efforts sont plus concentrés en culturisme.
En ciblant ces fibres associées à la force et à la puissance, cette technique de musculation par contraste permet donc d’améliorer l’explosivité, qui n’est autre qu’une combinaison de vitesse et force.
Pour vous aider à développer votre force, je vous invite à lire : Comment développer sa force musculaire de manière efficace ?
En parallèle, voici une vidéo explicative afin de déterminer les résultats à espérer après 6 mois de musculation :
Le bien-fondé de la méthode
La méthode bulgare s’appuie sur un principe simple pour aider à améliorer l’explosivité. S’inspirant des bienfaits avérés des efforts maximaux et répétés, cette technique préconise de rompre la monotonie du travail de musculation, en sollicitant le corps avec des successions de charges lourdes et légères.
Cette alternance contrastée vise à travailler la force avec les charges lourdes, et l’explosivité, avec les séries légères. Elle va surtout en contre-sens de la théorie selon laquelle l’hypertrophie serait uniquement le résultat de la mobilisation de charges lourdes.
Pour plus d’informations sur les séries longues et légères, je vous invite à lire : Les séries longues en musculation : différencier le vrai du faux
En effet, si pendant longtemps le développement de la force a été associé à la mobilisation de charges lourdes sur des séries courtes, ces dernières années, des études ont pu mettre en évidence qu’il est tout à fait possible d’avoir les mêmes effets en travaillant avec les charges légères jusqu’à épuisement.
Ceci sollicite aussi la quasi-totalité des unités motrices. C’est justement sur ce fait que s’appuient les méthodes de musculation par contrastes qui, grâce à une alternance de séries lourdes et de séries légères, préconisent une optimisation de l’entrainement en musculation.
La méthode bulgare est conseillée dans le cadre d’une préparation physique d’athlètes pratiquant des sports nécessitant une grande expression de l’explosivité.
Complément idéal du travail stato-dynamique, voir l’article Stato-dynamique : Augmenter rapidement son explosivité en musculation, le complex training recrute lors d’une même séance/série, les fibres blanches dans leur composante de force et de vitesse.
En dehors de ces avantages, la méthode bulgare à l’avantage d’être intéressante en termes de planification. Il est en effet possible de l’employer aussi bien en début de saison que dans les périodes de rappel de force.
Cela se passe aussi dans la tête
La méthode bulgare ne se limite pas uniquement au contraste de charges couplées. Elle suppose en plus que vous imprimiez une certaine vitesse durant l’exercice.
L’intérêt est d’obtenir des résultats significatifs pour ce qui est de l’amélioration de l’explosivité, à travers un procédé dit de potentialisation post tétanique. Celui-ci consiste à impacter le système nerveux, avec une trace persistante, matérialisée par l’intensité du signal généré par la charge lourde, avec pour effet induit la stimulation des exercices de mobilisation de charges plus légères.
D’ailleurs, à l’origine de la méthode bulgare, l’idée était d’améliorer la conduction nerveuse vers les muscles agonistes, grâce à la mobilisation de charges lourdes.
Ceci se fait parallèlement à l’optimisation des phénomènes calciques, dont celui de potentialisation. Toutefois, une contrainte essentielle est à prendre en compte. Vous devez veiller à ne pas faire trop de répétitions lourdes, afin de ne pas courir le risque d’une fatigue musculaire.
Ce paramètre est d’autant plus important qu’il peut influencer la vitesse d’exécution, mais aussi la qualité des séries légères. Pour des informations sur le système nerveux, je vous conseille de lire Les sportifs et l’influx nerveux.
La vitesse, un paramètre essentiel
La méthode bulgare est préconisée pour travailler les fibres blanches dans leur couple puissance/vitesse. Pendant que les répétitions lourdes travaillent davantage la puissance, l’intérêt d’un enchainement immédiat avec des charges légères, c’est de développer l’explosivité, ce qui d’une manière ou d’une autre, aide à préserver l’avantage du travail lourd, tout en réduisant la fatigue musculaire induite.
Dans le même temps, la vitesse d’exécution gagne en qualité et l’explosivité s’en trouve développée. Par ailleurs, lorsqu’au cours des séries légères, vous notez une chute de la vitesse, il est préconisé de diminuer le nombre de répétitions, afin de conserver une vitesse optimale.
Pour vous permettre d’éviter la fatigue, je vous conseille de lire : La fatigue en musculation : les causes et les solutions
Voici une vidéo explicative afin de déterminer quand et combien prendre de jours de repos en musculation :
Mise en œuvre de la méthode bulgare
Comme nous l’avons relevé précédemment, la méthode bulgare ou complex training s’appuie sur la mobilisation d’une charge lourde suivie de celle d’une charge légère, lors d’une même série et généralement sur le même exercice.
Il est toutefois possible de l’appliquer sur deux exercices différents, mais dans ce cas, en misant sur un geste technique spécifique. Toute la série se réalise sans temps de repos, ce qui suppose que vous devez pouvoir changer les charges assez rapidement.
La mise en œuvre de la méthode bulgare suppose en outre un bon choix de charges lourdes et légères. Si, de façon générale, il est préconisé d’utiliser des charges lourdes d’au moins 70 % d’1RM, combinées à des charges légères représentant 35 à 50% d’1RM, des études conduites, en 2003, par un scientifique, Baker, ont mis en évidence des résultats probants lorsqu’on réalise des répétitions avec des charges lourdes représentant environ le double des charges légères. En pratique, vous pouvez par exemple opter pour des répétions à 60-70 % d’1-RM et des séries à 25-40 % d’1-RM.
En pratique, la méthode bulgare permet une association d’une répétition lourde avec un travail spécifique à l’activité pratiquée par le sportif. Il est, par exemple, possible de faire des enchaînements de pull-over, avec un lancé de balle lestée ou encore un demi-squat, avec un contre en volley-ball.
Les possibilités de variations sont nombreuses et on bénéficie d’une grande diversité de séances, en fonction du profil de force et de l’activité physique exercée. Voici quelques exemples d’enchainements par sport et objectif :
Méthode bulgare et volley-ball
Après un échauffement complet, enchainez avec une montée de charges (jusqu’à 90 % d’1RM). Faites trois répétitions à 90 % d’1RM, en front squat et enchainez six sauts de bloc. Après environ trois minutes de repos, reprenez l’enchainement, jusqu’à cinq fois de plus.
Méthode bulgare et poussée de membres inférieurs
Pour la poussée des membres inférieurs, vous pouvez, après un échauffement soutenu, réaliser trois répétitions à 90 % d’1RM, en développé couché, puis enchainez rapidement avec six pompes pliométriques.
Autrement, vous pouvez enchainer avec six répétitions à 30 % d’1RM. Ici aussi, vous devez prendre trois minutes de repos, avant de reprendre l’enchaînement, deux à six fois de plus. Vous désirez des informations sur la pliométrie ? Je vous invite à lire : La pliométrie en musculation : le top pour l’explosivité
Méthode bulgare et extension des membres inférieurs
Après échauffement, faites trois séries à 90% d’1RM en squat. Puis, réalisez de suite, six sauts de haies à pieds joints. Ou, enchainez avec six squats-jump à 25 % d’1RM.
Quelques précautions à prendre
Tout entrainement axé sur la méthode bulgare doit nécessairement démarrer par un bon échauffement, pour mettre le corps dans les meilleures dispositions. Cette phase préparatoire est essentielle et doit être exécutée de manière rigoureuse, d’autant plus que les tendons et articulations sont très sollicités.
En parallèle, je vous invite à lire : L’échauffement avant la musculation : conseils et exercices
Basée davantage sur un cycle force plus que de volume, la méthode bulgare doit s’étaler sur 4 à 6 semaines, en fonction du sport et de l’athlète. Lorsqu’on utilise la méthode bulgare, il est recommandé de se soumettre à une alimentation hyperprotidique, afin de prévenir les micros déchirures inhérentes au travail lourd.
Une méthode qui n’a pas que des avantages
Si le principe de base et les bienfaits de la méthode bulgare ne sont pas à remettre en cause, il faut toutefois relever que sa mise en œuvre n’est pas sans inconvénient.
Tout d’abord, vous devez obligatoirement avoir un partenaire d’entrainement, notamment pour changer immédiatement les charges. Aussi faut-il disposer de deux ateliers en même temps pour pouvoir travailler correctement.
Autre bémol, cette technique de musculation interdit le recours à des poulies pour sa partie explosive, et le sportif, pour ne pas se blesser, est tenu de ne pas verrouiller ses articulations à l’issue du mouvement.
Ceci réduit donc l’amplitude du geste lors des mouvements explosifs. De même, cette méthode peut paraitre contraignante pour beaucoup, notamment parce qu’il n’y a pas de temps de repos entre l’alternance des séries lourdes et des séries légères.
Par ailleurs, il est essentiel de tenir compte du fait que les répétitions lourdes ne doivent pas être trop longues, au risque de provoquer une fatigue musculaire, pouvant altérer la qualité des séries légères.